Bancs publics

Arte TV a récemment diffusé « Bancs publics », une délicieuse comédie de Bruno Podalydès (2009) jouée par une pléiade de stars du cinéma français, Catherine Deneuve incluse.

Sous la fenêtre d’un immeuble d’habitation de Versailles, une banderole un peu sinistre crie en noir et blanc : « homme seul ». Juste en face se trouvent des bureaux où l’on se prépare à recevoir un ponte du siège. La curiosité le dispute à l’altruisme : l’inconnu solitaire ne serait-il pas en train de lancer un appel au secours ? Se jetterait-il par la fenêtre ?

Les beaux discours sur la part de marché, la croissance et les objectifs sonnent creux : l’homme seul occupe toute la place. Et quand M. Borelly (Pierre Arditi), le grand patron venu du siège, entre en scène pour mobiliser ses troupes sur les objectifs (croissance, part de marché, productivité), il n’a d’yeux que pour son téléphone portable qui lui annonce une rupture sentimentale. Il se prend les pieds dans le tapis de lapsus tous plus inconvenants et désopilants les uns que les autres.

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À l’heure de la pause, tout le monde se retrouve au square (de forme circulaire, évidemment, quadrature du cercle oblige !). Le maître du square, c’est un clochard (Éric Elmosnino) qui, le soir, aménage une couchette sous un toboggan ; à moins que ce soient les enfants eux-mêmes ; ou bien un dragueur qui prend pour cible une jeune femme éplorée ; ou encore ces gamins quinquagénaires qui pilotent à distance des modèles réduits de bateaux et s’agacent de l’espièglerie de l’employé municipal qui provoque une tempête avec la soufflerie normalement destinée à repousser les feuilles mortes.

Dans le quartier, on trouve aussi « Brico Dream », dont l’enseigne lumineuse oublie de manière malencontreuse, ou prémonitoire, la lettre « e », de sorte qu’elle se lit « Brico Drame ». Le chef de rayon (Denis Podalydès), n’a lui aussi que les mots « croissance » et « part de marché » à la bouche, mais il règne sur une bande de pieds nickelés aussi ignares que démotivés.

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Parmi ceux-ci se trouve Aimé (Bruno Podalydès), mal nommé puisque c’est lui, précisément, « l’homme seul ». Animée par la curiosité, une secrétaire de l’entreprise d’en face, Lucie (Florence Muller), pousse sa porte. Elle découvre qu’ils se sont déjà croisés au square sur des bancs publics. Dans l’appartement d’Aimé, elle avise une structure de kayak et des maquettes d’avion. Tout le personnel de l’entreprise regarde la fenêtre, avide de savoir ce qui va se passer. Mais Lucie ferme doucement le store.

« Bancs publics » est un film d’une poésie envoûtante, à la fois drôle et émouvant. Il se moque gentiment des discours managériaux à la mode. Se bécoter sur les bancs publics, comme chantait Brassens, est bien plus amusant que de faire du « street marketing » ! On a la surprise de voir apparaître à chaque séquence des visages connus du cinéma français, venus par leur participation comme seconds rôles témoigner leur amitié aux frère Podalydès.

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